Régimes matrimoniaux : dettes de la communauté en cas de décès de l'un des époux
Un époux marié sous le régime de la communauté universelle, avait contracté un crédit sans l’accord de son époux.
Il décède. Lors de la succession, son épouse et sa fille renoncent à la succession.
Le créancier estime que l’épouse est néanmoins tenue de rembourser le crédit. A juste titre estime la Cour de cassation, la dette contractée est due sauf à démontrer qu’elle avait été contractée par l’époux pour son intérêt personnel ce qui n’était pas le cas.
Et du fait de la clause d’attribution intégrale de la communauté, l’époux survivant qui recevait l’intégralité doit en payer toutes les dettes, c’est-à-dire en l’espèce, l’intégralité du crédit.
La solution est sévère pour le conjoint survivant, mais a pour but certainement d’assurer la sécurité des transactions.
« Attendu, selon l’arrêt attaqué (Dijon, 10 décembre 2015), que A... Y... et Mme X..., de nationalité allemande, se sont mariés le 5 avril 1974 sous le régime légal allemand ; que, par acte notarié du 5 mai 2006, ils ont, au visa de l’article 15, II, n° 3, de la loi d’introduction au code civil allemand et de l’article 6 de la Convention de la Haye du 14 mars 1978, adopté le régime de la communauté à titre universel conformément à l’article 1526 du code civil français, pour tous leurs biens immeubles en France, présents et à venir ; que, par un second acte du même jour, les époux Y... ont fait donation à leur fille, Christiane, d’une fraction indivise en nue-propriété d’un immeuble acquis par eux en 1994, situé à Saint-Loup-Géanges ; que, suivant acte sous signature privée de reconnaissance de dette établi à Stuttgart le 22 juillet 2011, M. Z... a prêté à A... Y... la somme de 80 000 euros ; qu’aucun remboursement n’étant intervenu, un jugement du tribunal de Stuttgart, le 22 février 2013, a condamné A... Y... au paiement de cette somme avec intérêts ; que A... Y... est décédé le [...] 2013 laissant pour lui succéder son épouse et sa fille (les consorts Y...) ; que ces dernières ont renoncé à la succession tant en France qu’en Allemagne ; que le jugement allemand ayant été rendu exécutoire en France, M. Z... a fait inscrire sur la propriété de Saint-Loup-Géanges une hypothèque provisoire ; qu’il a assigné les consorts Y... en inopposabilité pour fraude de leur renonciation à la succession, en liquidation partage de l’indivision successorale et de la communauté, en licitation de la propriété de Saint-Loup-Géanges et, à titre subsidiaire, en condamnation de Mme X... à lui payer les dettes communes ou reconnaître la faute des défenderesses et les condamner in solidum au paiement de sa créance ;
Attendu que Mme X... fait grief à l’arrêt de la condamner à payer à M. Z... une certaine somme, alors, selon le moyen, que chacun des époux ne peut engager que ses biens propres par un cautionnement ou un emprunt, sauf consentement exprès de son conjoint, ce principe s’appliquant aux époux mariés sous un régime de communauté universelle ; qu’en l’espèce, le mari ayant emprunté sans l’accord exprès de sa conjointe une somme d’argent à un moment où il était marié sous le régime de la communauté universelle, le créancier ayant consenti un tel emprunt ne pouvait pas saisir les biens communs et, par conséquent, réclamer le paiement de sa créance auprès de la femme ; qu’en affirmant que seule une dette née avant le changement de régime matrimonial des époux aurait pu n’engager que les biens propres et les revenus du mari et non ses biens communs, condamnant ainsi la femme au paiement du montant de l’emprunt, la cour d’appel a violé l’article 1415 du code civil ;
Mais attendu, d’abord, que, selon l’article 1409 du code civil, la communauté se compose passivement, à titre définitif ou sauf récompense, des dettes nées pendant la communauté et de celles résultant d’un emprunt contracté par un époux sans le consentement exprès de l’autre qui doivent figurer au passif définitif de la communauté dès lors qu’il n’est pas établi que l’époux a souscrit cet engagement dans son intérêt personnel ;
Attendu, ensuite, qu’il résulte de l’article 1524 du même code que l’attribution de la communauté entière en cas de survie oblige l’époux qui en retient la totalité d’en acquitter toutes les dettes
Et attendu qu’après avoir estimé, par motif adopté, qu’il n’était pas démontré que la dette avait été contractée dans l’intérêt exclusif de l’époux prédécédé, la cour d’appel qui a relevé que la clause d’attribution intégrale de la communauté au survivant avait été mise en œuvre du fait du décès du conjoint, en a exactement déduit que Mme X..., à laquelle était attribuée la totalité de la communauté en pleine propriété, était tenue de la dette entrée en communauté du chef de son conjoint ;
D’où il suit que le moyen ne peut être accueilli ».
(Cass, Civ1, 5 décembre 2018 , pourvoi n° 16-13.323, Publié au bulletin)
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