Divorce prononcé à l'étranger et ordre public international français
Le jugement de divorce rendu en méconnaissance du principe du contradictoire à l’étranger est contraire a l’ordre public international et inopposable à l’époux qui n’a pas été avisé de la procédure.
Monsieur N… et Madame L…, tous deux de nationalité française et libanaise, se sont mariés à Tripoli au Liban.
Le 22 mai 2013 Madame L… a saisi le juge français d’une requête en divorce.
Monsieur K… lui a opposé l’autorité attachée à une décision du tribunal islamique sunnite de Tripoli du 10 avril 2012 confirmant la déclaration définitive de divorce qu’il avait souscrite, hors tribunal le 7 avril 2012.
La Cour d’appel de Bordeaux, le 4 juillet 2019, a rendu un arrêt sur renvoi après cassation, et décide que le jugement du tribunal de Tripoli du 10 avril 2012 est inopposable. La Cour d’appel a retenu que le jugement de divorce du 10 avril 2012 ratifiant la décision du 7 avril 2012 avait été rendu en méconnaissance du principe du contradictoire et des droits de la défense de Madame L… car elle n’avait pas été avisée de la procédure.
Par ailleurs, elle juge que le jugement rendu le 10 avril 2012 était contraire à l’ordre international public car il avait été prononcé sur le fondement de textes légaux non précisés.
Monsieur K… a donc formé un pourvoi en cassation en soutenant que le prononcé d’un jugement de divorce libanais pour abandon par l’épouse de sa famille ne peut être assimilé à un acte de répudiation unilatérale et discrétionnaire du mari. Il soutient que le jugement de divorce du tribunal religieux de Tripoli n’est pas contraire à l’ordre public international car il s’agissait selon lui d’un véritable jugement de divorce motivé par l’abandon par Madame L… de son mari et de ses enfants et non pas d’une répudiation unilatérale de l’épouse par l’époux.
Il soutient également que Madame avait été informée de la procédure et qu’elle n’avait pas accepté de retirer le courrier recommandé d’avertissement qui lui avait été envoyé.
La Cour de cassation rappelle dans un premier temps l’article 509 du code de procédure civile aux termes duquel l’efficacité des jugements étrangers concernant l’état des personnes est reconnue en France, sous réserve du contrôle de leur régularité internationale.
Le juge français doit, en l’absence de convention internationale, s’assurer que trois conditions sont remplies, à savoir la compétence indirecte du juge étranger fondée sur le rattachement du litige au juge saisi, la conformité à l’ordre public international de fond et de procédure ainsi que l’absence de fraude.
La Cour confirme que Monsieur N… ne démontre pas que Madame L… a été régulièrement avisée de la procédure de divorce engagée à son encontre devant la juridiction étrangère. Par ailleurs, elle décide que la notification par voie de publication et d’affichage de la décision de divorce est indifférente s’agissant du non-respect du principe de la contradiction lors de la première phase de la procédure.
Ainsi, le jugement de divorce libanais est inopposable à l’épouse car celle-ci n’avait pas été mise en mesure de faire valoir utilement ses droits devant le juge libanais. La décision prononçant le divorce avait donc bien, comme le déduisait la Cour d’appel, été rendue en violation de l’ordre public international de procédure et ne pouvait donc pas produire effet en France. La Cour de cassation rejette donc le pourvoi de Monsieur K….
Cass, civ1, 17 mars 2021, pourvoi n°19.26071
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