Intérêt supérieur de l’enfant et maintien du lien entre cet enfant et l'ex concubine de la mère biologique de l'enfant
Deux concubines se sont séparées, quid de l’enfant de la mère biologique ?
L’ex-concubine est-elle fondée à demander à maintenir des liens avec cet enfant, même si elle n’avait aucun lien de filiation avec cet enfant ?
La Cour de cassation répond de manière classique que ce qui importe c’est l’intérêt supérieur de l’enfant : si entre l’ex-concubine de sa mère et l’enfant, il s’était créé des liens, si cette ex-concubine avait considéré l’enfant comme le sien et avait pourvu à son entretien, on peut considérer au regard de l’intérêt supérieur de l’enfant que l’enfant a le droit de maintenir des liens avec l’ex-concubine de sa mère.
« Attendu, selon l'arrêt attaqué (Besançon, 1er septembre 2016), qu'Alice X...est née le 28 juin 2011 de Mme X..., sans filiation paternelle déclarée ; que, lors de sa naissance, sa mère partageait la vie de Mme Y...; que, les deux femmes s'étant séparées le 30 avril 2013, Mme Y...a saisi le juge aux affaires familiales afin de se voir attribuer un droit de visite et d'hébergement sur l'enfant ;
Attendu que Mme X...fait grief à l'arrêt de dire que Mme Y...bénéficiera sur Alice d'un droit de visite, puis d'un droit d'hébergement, alors, selon le moyen :
1°/ que si tel est l'intérêt de l'enfant, le juge aux affaires familiales fixe les modalités des relations entre l'enfant et un tiers, parent ou non, en particulier lorsque ce tiers a résidé de manière stable avec lui et l'un de ses parents, a pourvu à son éducation, à son entretien ou à son installation et a noué avec lui des liens affectifs durables ; qu'en l'état du droit positif, l'existence d'un projet parental commun, qui plus est lorsqu'elle est contestée par la mère biologique, ne saurait suffire à permettre au juge aux affaires familiales d'accorder un droit de visite ou d'hébergement à l'ancienne compagne de cette dernière ; qu'en jugeant le contraire, la cour d'appel a violé l'article 371-4 du code civil ;
2°/ que dans toutes les décisions qui le concernent, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ; que ce n'est que si tel est l'intérêt de l'enfant que le juge aux affaires familiales fixe les modalités des relations entre l'enfant et un tiers, parent ou non, en particulier lorsque ce tiers a résidé de manière stable avec lui et l'un de ses parents, a pourvu à son éducation, à son entretien ou à son installation et a noué avec lui des liens affectifs durables ; qu'en accordant un droit de visite et d'hébergement à Mme Y..., sans rechercher si l'enfant, âgée de 5 ans, et ne l'ayant pas revue depuis l'âge de 2 ans ne l'avait pas oubliée, un enfant de cet âge ne pouvant avoir de souvenir des deux premières années de sa vie, si Mme Y...n'était pas ainsi devenue une étrangère pour elle, et si, dans ce contexte, un droit de visite, et plus encore d'hébergement, ne serait pas contraire à l'intérêt d'Alice, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 371-4 du code civil ensemble l'article 3, § 1, de la Convention de New-York du 20 novembre 1989 relative aux droits de l'enfant ;
3°/ que dans toutes les décisions qui le concernent, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ; que ce n'est que si tel est l'intérêt de l'enfant que le juge aux affaires familiales fixe les modalités des relations entre l'enfant et un tiers, parent ou non, en particulier lorsque ce tiers a résidé de manière stable avec lui et l'un de ses parents, a pourvu à son éducation, à son entretien ou à son installation et a noué avec lui des liens affectifs durables ; que la circonstance que le parent biologique ait mis un terme à la relation entre un tiers et l'enfant ne saurait suffire à écarter toute recherche sur l'intérêt de ce dernier à ce qu'un droit de visite et d'hébergement soit reconnu à ce tiers ; qu'en considérant toutefois, pour accorder un droit de visite et d'hébergement à Mme Y..., que dans la mesure où la mère était directement à l'origine de l'arrêt des rencontres entre sa fille et son ancienne compagne, elle était mal fondée à soutenir qu'il serait contraire à l'intérêt de l'enfant de renouer des liens avec celle qui se considérait comme sa seconde mère, la cour d'appel a violé les articles 371-4 du code civil ensemble l'article 3, § 1, de la Convention de New-York du 20 novembre 1989 relative aux droits de l'enfant ;
Mais attendu que, selon l'article 371-4, alinéa 2, du code civil, dans sa rédaction issue de la loi n° 2013-404 du 17 mai 2013, si tel est l'intérêt de l'enfant, le juge aux affaires familiales fixe les modalités des relations entre l'enfant et un tiers, parent ou non, en particulier lorsque ce tiers a résidé de manière stable avec lui et l'un de ses parents, a pourvu à son éducation, à son entretien ou à son installation, et a noué avec lui des liens affectifs durables ;
Attendu que l'arrêt relève, d'abord, que les parties vivaient en couple au moment de la naissance d'Alice et qu'il existait un projet parental commun au moment de la conception de l'enfant, que Mme Y...a résidé durant plus de deux ans avec Mme X...et Alice, qu'elle considérait comme sa fille, et qu'il existait un lien affectif durable entre elles, dont la rupture n'est due qu'au refus de Mme X...de maintenir cette relation ;
Que l'arrêt énonce, ensuite, que l'intérêt de l'enfant commande qu'elle ait accès aux circonstances exactes de sa conception, de sa naissance, ainsi que des premiers temps de son existence, sans que cela n'empêche une relation affective de qualité avec l'actuel compagnon de sa mère, et que l'existence de relations conflictuelles entre les parties n'est pas un obstacle suffisant pour justifier le rejet de la demande formée par Mme Y..., dès lors qu'Alice, décrite comme une enfant épanouie et équilibrée, est en mesure de renouer des liens affectifs avec cette dernière ;
Qu'il constate, enfin, que la demande présentée par Mme Y..., qui ne sollicite qu'un simple droit de visite, en proposant de se déplacer pour voir l'enfant, témoigne de l'intérêt qu'elle porte à Alice et de son désir de ne pas brusquer la mineure en reprenant de manière progressive et adaptée des contacts avec elle, avant de pouvoir à nouveau la recevoir à son domicile ;
Que la cour d'appel, qui a ainsi statué en considération de l'intérêt supérieur de l'enfant, qu'elle a souverainement apprécié, a fait une exacte application du texte susvisé et de l'article 3, § 1, de la Convention de New-York du 20 novembre 1989 ».
(Cass, Civ1, 13 juillet 2017, pourvoi n°16-24084,Publié au bulletin, Rejet)
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