Intérêt supérieur de l’enfant : nom du père et action en recherche de paternité
Une action en recherche de paternité a été diligentée contre le père biologique qui n’avait pas reconnu l’enfant. L’expertise génétique a établi la paternité.
Le père refusait que l’enfant puisse porter son nom.la Cour d’appel n’a pas dit que l’enfant pourrait porter le nom du père.
La Cour de cassation a estimé que la Cour d’appel n’avait pas méconnu l’intérêt supérieur de l’enfant, dès lors que le père se désintéressait totalement de l’enfant et n’avait pas l’intention de s’impliquer, ce n’était pas l’intérêt supérieur de l’enfant de porter le nom de son père dont la filiation avait été établie et que le fait de porter ce nom le renverrait au rejet dont il était l’objet.
« Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 19 mars 2015), que, le 13 mai 2011, est née l'enfant A..., reconnue par sa mère, Mme X... ; que, le 25 août 2011, cette dernière a assigné M. Y... en établissement du lien de filiation à l'égard de l'enfant ; qu'une expertise biologique ayant conclu à la paternité de l'intéressé, un tribunal a, notamment, dit que M. Y... était le père de l'enfant, dit que l'autorité parentale serait exercée exclusivement par la mère, fixé la résidence habituelle de l'enfant au domicile de cette dernière et dit qu'elle se nommerait désormais A... X... Y... ;
Attendu que Mme X... fait grief à l'arrêt de dire n'y avoir lieu d'adjoindre, pour l'enfant, le nom du père à celui de sa mère alors, selon le moyen :
1°/ que l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale dans toutes les décisions le concernant, notamment quand il s'agit pour une juridiction de lui attribuer un nom dans le cadre d'une action judiciaire relative à sa filiation ; qu'en refusant à A... le droit de porter le nom de son père accolé à celui de sa mère, en considération seulement du désintérêt du père pour son enfant, la cour d'appel a violé l'article 3 de la Convention internationale des droits de l'enfant du 20 novembre 1989 ;
2°/ que l'enfant a droit de préserver son identité, y compris son nom et ses relations familiales, tels qu'ils sont reconnus par la loi ; que dans ses conclusions d'appel, Mme X... faisait valoir que des liens familiaux et d'affection s'étaient noués entre A... et son grand-père paternel, M. René Y..., que son appartenance à la famille Y... faisait partie intégrante de son identité, à tel point que A... s'identifiait spontanément comme « A... X... Y... », et qu'il était de l'intérêt supérieur de l'enfant de préserver son droit à cette identité, tel qu'il existait d'ores et déjà ; qu'ayant constaté que l'intérêt de l'enfant devait s'apprécier au regard du contexte familial, la cour d'appel qui a infirmé le jugement ayant accolé le nom du père à celui de la mère, par un motif d'ordre général tiré d'un risque éventuel pour l'enfant du fait du désintérêt du père, sans s'expliquer sur la situation particulière de A... au regard de ces circonstances spécialement invoquées devant elle, a privé sa décision de base légale au regard des articles 3, 7 et 8 de la Convention internationale des droits de l'enfant du 20 novembre 1989 ;
3°/ que tout jugement doit être motivé ; que le motif hypothétique équivaut à un défaut de motif ; qu'en retenant, pour refuser à A... de porter le nom de son père accolé à celui de sa mère, le « risque de confronter en permanence l'enfant par le simple énoncé de son nom au rejet dont il est l'objet de la part d'un père qui n'entend pas s'intéresser à lui », la cour d'appel a statué par un motif hypothétique et a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
Mais attendu que la cour d'appel, qui ne s'est pas déterminée par un motif d'ordre général ou par un motif hypothétique, a pris en considération l'ensemble des intérêts en présence, dont celui supérieur de l'enfant, et a relevé, d'une part, que son nom n'avait pas d'incidence sur le lien de filiation, qui était judiciairement établi et n'était plus contesté, d'autre part, qu'accoler au nom de la mère celui d'un père qui n'entendait pas s'impliquer dans la vie de l'enfant et s'intéresser à lui risquait de confronter en permanence ce dernier au rejet dont il était l'objet de la part de son père ; que par ces motifs, la cour d'appel a souverainement estimé qu'au regard du contexte familial, il n'était pas de l'intérêt de l'enfant de porter le nom de son père ; que le moyen n'est pas fondé ».
(Cass, Civ1, 11 mai 2016, pourvoi n°15-17185, Publié au bulletin)
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