Mariage : nullité, défaut de consentement, mariage fictif, Convention Européenne des Droits de l’Homme
La Cour de cassation confirme l’arrêt de la Cour d’appel qui avait prononcé la nullité du mariage conclu entre un défunt et la fille de sa compagne : il s’agissait d’un pur mariage fictif décidé entre le défunt et sa compagne à des fins uniquement patrimoniales au profit de l’enfant de sa compagne, afin qu’elle ait un avenir assuré.
La demanderesse au pourvoi se prévalait de l’article 8 de la Convention Européenne des Droits de l’Homme pour prétendre que la nullité prononcée constituait une ingérence dans la liberté de se marier et à la vie familiale.
La Cour de cassation considère que l’article 8 de la Convention Européenne des Droits de l’Homme n’a pas vocation à protéger les mariages fictifs. Ce qui était bien le cas en l’espèce, puisque le défunt et la fille de sa compagne n’avaient jamais eu un instant une volonté de vie commune. Il s’agissait d’un faux mariage à fin uniquement patrimoniale. Le mariage avait été détourné de sa finalité.
« Attendu, selon l’arrêt attaqué (Versailles, 28 janvier 2016), que Gilbert Y... et Mme Brigitte X... se sont mariés le 21 décembre 2000 ; que, soutenant que leur père vivait maritalement depuis de nombreuses années avec la mère de son épouse, Mme Geneviève X..., et que ce mariage n’avait été contracté qu’à des fins successorales, M. Régis Y... et Mme Annick Y..., nés d’une précédente union de Gilbert Y..., ont, après le décès de celui-ci, survenu le 13 mars 2011, assigné Mme Brigitte X... en annulation du mariage, sur le fondement de l’article 146 du code civil ;
Sur le premier moyen :
Attendu que Mme X... fait grief à l’arrêt d’annuler son mariage avec Gilbert Y... alors, selon le moyen, que précédée d’un contrat de mariage en date du 30 novembre 2000, la célébration du 21 décembre 2000 a eu lieu en présence d’un tiers attestant de la volonté de M. Y... d’épouser Mme X... et a été suivie d’actes révélant une communauté de vie (déclarations fiscales communes et intervention de Mme X... auprès de l’administration en tant qu’épouse lors de l’hospitalisation de M. Y... et à la suite du décès), sachant que l’union a duré onze ans ; que faute d’avoir recherché si la demande en nullité de mariage ne constituait pas une ingérence injustifiée dans le droit de Mme X... au respect de sa vie privée et familiale, les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard de l’article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, ensemble au regard de l’article 9 du code civil ;
Mais attendu qu’un mariage purement fictif ne relève pas de la sphère protégée par les articles 8 et 12 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, en l’absence de toute intention matrimoniale et de toute vie familiale effective ;
Attendu qu’ayant relevé, d’une part, que Gilbert Y... avait vécu maritalement avec Mme Geneviève X... depuis les années 1990 jusqu’à son décès et qu’aucun élément n’établissait une autre communauté de vie que celle qu’il entretenait avec celle-ci, d’autre part, qu’il n’y avait pas eu, entre Mme Brigitte X... et Gilbert Y..., le 21 décembre 2000, échange de consentements véritables en vue d’une union matrimoniale mais un mariage de façade destiné, pour Gilbert Y... et Mme Geneviève X..., à assurer l’avenir de la fille de celle-ci, la cour d’appel qui n’était pas tenue de procéder à une recherche que ses constatations rendaient inopérante, a légalement justifié sa décision ».
(Cass Civ1, 1er juin 2017, pourvoi n°16-13441, publié au bulletin)
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